Journées d'étude pluridisciplinaire
30 sept.-1 oct. 2021 Arras, Bruay-La-Buissiere (France)

Argumentaire

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Aujourd'hui, la recherche en sciences humaines et sociales sur le bassin minier du nord de la France est très dynamique, notamment grâce aux études menées par de jeunes chercheur.ses. En effet, de nombreuses thèses sur ce terrain particulier sont actuellement en cours ou ont été récemment soutenues. Quelques publications commencent progressivement à rendre compte de cette effervescence. Le dernier numéro des Cahiers de la Recherche Architecturale, Urbaine et Paysagère[1] paru en juin 2020 qui porte sur la réparation des territoires post-miniers propose trois articles sur ce terrain et deux d'entre eux ont été écrits ou co-écrits par de jeunes chercheurs (Mortelette, 2020 ; Prost, Monsaingeon, 2020). De même, les différentes éditions des Ateliers de Recherche sur le Nord rendent compte d’une multiplication et d’un croisement des travaux de recherche de doctorant.es issu.es de disciplines diverses[2].

Jusqu'à récemment, cette recherche n’était que faiblement lisible par manque de productions développées. Pour exemple, en géographie, depuis la thèse de Guy Baudelle en 1994 portant sur le système spatial de la mine, seules trois autres thèses ont été soutenues en 25 ans (Liefhooge, 2002 ; Wiesztort, 2011 ; Mortelette, 2019). Dans d’autres disciplines (sociologie, ethnologie, sciences politiques, aménagement, architecture, histoire), les thèses qui abordent le bassin minier comme un cas d’étude singulier sont également assez rares. Cependant, cette période, entre le début des années 1990 et les années 2000, est synonyme d'un profond changement pour ce territoire, voire de plusieurs bouleversements. En effet, le passage d’un système minier à un système post-minier a entraîné des conséquences plurielles pour le territoire sur les plans sociaux, économiques, culturels et environnementaux. De fait, si le bassin minier pouvait apparaître comme un territoire dans lequel il ne se passe "rien", représentation qui explique peut-être une absence de curiosité scientifique, l’action publique locale a pourtant engagé plusieurs chantiers pour accompagner de manière multidimensionnelle le territoire et les habitants dans le processus de la sortie de concessions depuis les années 1990.

L'inscription au patrimoine mondial de l'Unesco en 2012, suivie quelques mois plus tard de l'arrivée du Louvre-Lens ont, d’une certaine manière, permis de remettre le bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais sur la carte mais sont, avant tout, le résultat d’un long cheminement.

Le bassin minier propose aujourd'hui le visage d'un territoire en transition sur les plans culturel et patrimonial bien sûr, mais aussi écologique, énergétique, politique et démographique. Nous pouvons évoquer quelques processus structurants comme l’affaiblissement des partis traditionnels (parti communiste et parti socialiste), la lente diversification des secteurs économiques, l’évolution dans le traitement paysager des friches minières ainsi que le changement de regard sur ces dernières, ou encore la disparition de certaines sociabilités liées à la mono-industrie qui a donné son nom et une identité au territoire. À ces dynamiques contrastées, il faut également ajouter des invariances qui continuent de singulariser le bassin minier : des indicateurs socio-démographiques (santé, chômage, formation) négatifs, une présence persistante de la mine comme marqueur identitaire mais aussi une diversité culturelle notable.

Pour autant, il ne faut pas voir ce bassin minier comme un territoire homogène, ni les habitants comme formant un corps social cohérent, les réalités socio-spatiales pouvant être contrastées d’un point à un autre de cet ancien bassin économique. De même, le poids de l’univers minier (à travers un nom, un paysage ou une communication politique) ne doit pas occulter une trajectoire territoriale qui s'émancipe du poids de l'héritage minier.

Ces processus et marqueurs parfois contradictoires montrent bien la tension qui traverse aujourd’hui un territoire entre permanences et mutations, entre passé et projets. De fait, les pouvoirs publics (de l’Etat aux collectivités territoriales) investissent massivement pour son renouveau et ce, de manière très médiatisée. Dans le même temps, les projets de recherche se sont également multipliés grâce à l’accroissement de possibilités de financement mais aussi, de manière plus diffuse, grâce à un renouvellement de l'intérêt scientifique[3] pour ce territoire longtemps en marge du dynamisme de la métropole lilloise malgré des interdépendances multiples.

Nous le disions plus haut, de nombreux.ses jeunes chercheur.ses travaillent aujourd'hui sur ce territoire en plein renouveau et proposent des perspectives inédites ainsi que de nouveaux questionnements qu'il conviendrait de croiser. Pourtant, les événements scientifiques liés à ce terrain particulier sont rares, voire inexistants, au profit de rencontres disciplinaires ou thématiques. Aussi, ces jeunes chercheur.ses n’ont que trop peu l’occasion de se rencontrer et d’échanger entre elles et eux.

Les journées que nous organisons appellent à croiser les regards, les expériences de recherche et les premiers résultats ; à la fois en termes de champs disciplinaires, d’objets d’étude (renouveau par la culture, bouleversements et tensions politiques, reconversion économique, etc.), de pratiques de recherche (immersion, socio-filmée, récit de vie, recherche-action, etc.) et de rencontres avec des chercheur.ses confirmé.es afin de favoriser le partage d’expérience.

 

Plus largement, ces journées ont vocation à :

- Créer un réseau pluridisciplinaire de jeunes chercheur.ses afin d’instaurer une interconnaissance profitable à la production de connaissances sur le bassin minier. Ce réseau aura pour objet de se réunir régulièrement avec une ambition première de consolider des liens interdisciplinaires et interinstitutionnels et de fixer des objectifs scientifiques à long terme (publications, écoles d’été).

- Accompagner ces jeunes chercheur.ses sur les plans épistémologiques et méthodologiques. Cette première rencontre a également une vocation formatrice pour ces jeunes professionnel.les de la recherche grâce à la présence de chercheur.ses expérimenté.es.

Cet appel à communication est donc volontairement ouvert à toutes les approches, à toutes les disciplines des sciences humaines et sociales, à tous les objets d’étude sans élaboration d’axes qui restreindraient les propositions scientifiques. L’entrée est celle du bassin minier considéré à différentes échelles temporelles et spatiales. Nous serons néanmoins attentif.ves à la problématisation, à la rigueur scientifique et à l’originalité de forme (les propositions de communication in situ ou partageant une méthodologie singulière sont les bienvenues) de la proposition. Une place sera également accordée aux propositions offrant la perspective de la comparaison nationale et internationale.

 

Comité scientifique :

Elizabeth Auclair, CY Cergy Paris Université, MRTE

Clément Barbier, Université Polytechnique de Valenciennes, CRISS

Marion Fontaine, Avignon Université, TELEMME, Centre Norbert Elias

Laurent Gagnol, Université d’Artois, Discontinuités

Tarik Haroud, Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme de Rabat, Maroc

Béatrice Mariolle, Ecole Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Lille, chercheure UMR AUSser, chercheure associée au LACTH

Camille Mortelette, Université d’Artois, Discontinuités

Marie Patou, chargée de mission Patrimoine - Éducation, Mission Bassin Minier

Philippe Prost, Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-Belleville, IPRAUS-UMR AUSser

 

Comité d’organisation :

Noémie Devaux, Ecole Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Lille, LACTH

Lucas Monsaingeon, CY Cergy Paris Université, MRTE et Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles, LéaV

Camille Mortelette, Université d’Artois, Discontinuités
 

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[1] https://journals.openedition.org/craup/3658

[2] https://ceraps.univ-lille.fr/evenements-scientifiques/ateliers-de-recherche-sur-le-nord/

[3]  Il faut souligner la création récente d’une chaire partenariale à l’ENSAP-Lille, dirigée par Béatrice Mariolle, “Acclimater les territoires post-miniers” labellisée par le Ministère de la Culture et de la Communication le 2 juillet 2020 ainsi qu’un projet émergent d’Institut fédératif de recherches sur le renouveau des territoires, notamment porté par l’ERBM.

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